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#1 2009-07-27 21:23:53

Saphir
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Lieu: Dans les méandres de mes rêves
Date d'inscription: 2004-03-19
Messages: 1143

La Rivière du Temps

Dans les Méandres du Temps, une Âme Errante cherche sa Vérité...

Par-delà les montagnes, les plaines, les volcans, les gorges… Au-delà des frontières des océans, tentant de capter la sensation de toucher l’horizon… Le cœur empli de l’engouement de l’aventure, l’âme véhémente, arc au poing, j’étais partie il y a de cela quelques années pour l’inconnu, voguant sur des mers hostiles au côté de mes compagnons de fortune, sur quelque navire branlant aux voiles battantes. Le vent avait mille fois balayé les plaines, emportant mes cheveux et les crins de mon étalon au passage… La pluie avait autant de fois trempée mes vêtements et ma peau… Le Soleil, plus encore, avait baigné mon chemin…
Je sentais encore l’odeur de l’herbe des plaines, de l’eau de l’océan, de la neige des montagnes… Ce continent, je le connaissais par cœur et âme… Les cartes ne m’apprenaient plus rien. Mon instinct était mon seul guide, mon cheval mes jambes…

Un grondement de tonnerre… La pluie battante laisse son rideau se faire balayer par le souffle du vent, puissant. Assise, genoux repliés, bras en appuis, trempée jusqu’à la moelle, au bord d’un pan de montagne, je fixe l’horizon noir de cette nuit sans Lune… Un éclair fend le ciel et rugit, faisant trembler la terre, déchirant le ciel noir d’une blanche lumière aveuglante. Je fixe le ciel, et ferme les yeux… Des voix résonnent dans ma tête… Des voix anciennes… J’en ai oublié parfois les noms… Certains autres me reviennent avec aisance…
J’ai grandi ici… Sur ce continent… Voyageant encore et toujours, fendant l’air sur ma fidèle monture. J’ai grandi au milieu de personnes dont ma jeunesse désinvolte et aveugle ne m’avait pas permis de percevoir toutes les qualités… J’ai grandi dans ses contrées et y ai beaucoup appris… Y ai appris certaines règles de la vie… M’y suis laissée donner des valeurs profondes et justes… Ce continent avait été mon berceau, mon berceau sauvage et silencieux… Nombre de mes actes me revenaient… Je n’étais qu’une enfant comme une autre, au milieu de personnes formidables.

Je me relève… Maintenant, je contemple cette plaine avec une lueur de crainte… Avant, j’y courrais librement… Cette nature hostile et primaire était mon territoire… Maintenant, elle n’est plus que souvenir illusoire, bafouée par le temps. Je ne sais plus m’y repérer sans carte, l’arpentant à pied, ayant perdu toute trace de mon fidèle destrier.

Je me souviens encore de mon exploitation, baignée par le Soleil Aquondien… Je me souviens du ressac de la mer me berçant, adossée au mât ou à un arbre tropical de notre colonie… Je me souviens du bruit du marché, des voix des commerçants, des discussions du forum… Du claquement de la corde de mon arc, alors que je décochais un trait au sifflement distinct… Je me souviens de Priène et des autres villes qui furent mon refuge. De ma demeure, modeste mais chaleureuse. De mes animaux, compagnons de labeur, moyens de subsistance…

J’ai tout perdu…

De mon petit empire il ne reste maintenant que des souvenirs… Tant de temps a passé… Il ne me reste pour consolation que ces souvenirs futiles, volatiles, de mon histoire… Du commencement réel de mon existence… Certainement beaucoup de ceux qui m’ont forgée sont-ils retournés sur Terre. Mes compagnons sont certainement tombés, attendant éperdument mon retour sans jamais le voir venir… Il ne reste certainement de ma demeure que des ruines, dont les cendres se seraient éteintes… De mon association que quelques papiers dans un bureau de mairie… De mes heures de commerce, que quelques exos couverts de rouille. S’il reste un rien de ce petit Empire que je m’étais bâti, il ne m’appartient plus… Je ne saurais pas m’y reconnaître… Je ne saurais certainement pas le reprendre en main…

Dans un nouvel éclat de lumière, sous les torrents d’eau qui tombent du ciel, sur la ligne de l’horizon, se dessine une ville… Une infime silhouette brisant la ligne droite de l’horizon maritime… La côte… La mer… Cette mer qui m’avait apportée de quoi vivre… Cette mer où vivaient mes compagnons aquatiques… Cette mer que j’avais fendue sur notre fier galion… Cette mer qui avait été le refuge de mes déboires et de mes pleures… Cette mer qui maintenant m’était inconnue.

Droite sur mes pieds, je soupire… Et fais volte-face… Un nouvel éclat de colère de la Nature ébranle le sol… Je ramasse ma sacoche, et en passe la sangle à la transversale de mon poitrail… Mes pas m’emmènent encore une fois… Le sentier rocheux de la montagne accueille mon cheminement silencieux.
Ma Mémoire m’avait poussée à revenir fouler les terres de mon Passé… La nostalgie l’y avait aidée… Et me revoilà sur cette terre dont j’ai presque tout oublié, où il me reste maintenant énormément à découvrir ou redécouvrir… Ce monde qui n’avait plus de secrets pour moi c’était voilé de mystères et de silence, taisant certaines voix. Ce monde, j’y avais vécu trois ou quatre ans, avant de peu à peu m’effacer, puis de faire comme tant d’autre, revenir sur Terre…

Pourtant, je n’ai jamais eu le courage de tirer un trait… D’oublier…

Aquonden, à un jour de marche, m’accueillera peut-être une nouvelle fois… Mon avenir ici est incertains, passage ou retour… Le temps en décidera… Mes pas m’emmènent… Demain, peut-être que la vagabonde reviendra… Peut-être.


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"Exergue ou court chapitre d’une histoire qui, semble-t-il, ne finira jamais..."
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#2 2009-07-28 07:45:49

Saint_Monon
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Lieu: Kriekcity
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Re: La Rivière du Temps

ouf ti , joli! belle plume!


http://pimg.imagesia.com/fichiers/14e/images_imagesia-com_14er6_large.jpg

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#3 2009-07-28 09:39:00

Saphir
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Lieu: Dans les méandres de mes rêves
Date d'inscription: 2004-03-19
Messages: 1143

Re: La Rivière du Temps

Un nouveau grondement de tonnerre… Mais moins puissant que les autres… Une lumière plus blafarde… Une obscurité plus intense, moins bafouée de flash… Des gouttes plus espacées… Moins conséquentes, faisant onduler la surface des flaques couvrant le sol. Une déchirure dans le manteau d’encre du ciel, et une lumière d’une pureté infinie de notre Lune de lait qui transperce et s’échoue sur notre monde… Cette ville, cassure de la ligne de l’horizon, semble y baigner toute entière, comme si un quelconque Divin éclairait mon chemin jusqu’à elle… Comme si elle était une révélation.
Nombre de battements de cœurs… Nombre de pas… La pluie s’arrête, les nuages se déchirent et s’écartent… Une brise délicate s’éveille… Mes vêtements me collent… Mon échine frissonne alors que le froid mordant du cœur de la nuit me hérisse le duvet sur le cou… Les gouttelettes d’eau dégoulinent de mes cheveux sur mes épaules… Ma peau devient moite au cours du temps… Mes bottes laissent filtrer de l’eau qui vient me tremper les pieds… Une eau froide, salvatrice.
Tels mes cheveux, l’herbe s’égoutte peu à peu… Les montagnes ruissellent… J’entends au loin le grondement de torrents ravivés par la tempête… Des branches d’arbre proches craquent, semblant se redresser alors qu’elles se délestent du fardeau aqueux. Le silence de la Nature, sans autre forme de civilisation. Ce silence qui n’est pas le silence total, juste le bruissement des végétaux, de mes pas dans l’eau, du vent… Ce silence sauvage et mystérieux, dont peu savent en fait qu’il est plus porteur de signification que n’importe quel ouvrage… J’en savais décrypter les signes, comme tant d’autres de mes compagnons… Je n’en savais plus grand-chose.

Mon pied droit s’enfonce alors dans une étendue boueuse, mon mollet suit jusqu’à sa moitié… Mon autre jambe se plie… Je tombe à moitié à genoux, mes mains ayant juste le temps de se placer devant moi, pour ne pas que je mordre la poussière… Poussière mouillée, compactée en une boue visqueuse et glissante... Je me penche sur le côté, et sort mon membre du bourbier… En un dernier effort, je me relève. Je me regarde… Je suis imprésentable… La peau maculée de terre et de cendre, de poussières de roche mouillée, formant des plaques semblant d’argile en séchant, craquelant… Les vêtements sales et parfois déchirés… Plus trempée que si j’avais pris un bain… Des égratignures et des écorchures un peu partout… Fatiguée, les traits sûrement tirés…

Bierville… Les Pays-Herts… Tout cela me paraissait si lointain… Alors que tout était si proche, en fait…

Ma marche reprend, douloureuse… Ma hanche droite me fait légèrement souffrir… Pas au point d’en boiter, mais suffisamment pour m’incommoder.
Quelques heures… Je trébuche sur une terre masquée par le miroir de l’eau… Je tombe à quatre pattes… J’halète péniblement… Le voyage m’a été plus rude que je ne le pensais… Mes yeux, clos, s’ouvrent à nouveau à la lumière Lunaire… Je regarde dans une flaque… Un reflet… Ce reflet dans ce miroir aqueux… Mon reflet… Il a changé… Plus rien n’est pareil… Je ne suis plus la Saphir qui a vécu ici… Je ne suis certainement plus grand-chose… Voir plus rien… Peut-être encore un vague souvenir dans certaines mémoires… Mais pas davantage. Elle est loin, la Saphir d’Aquonden… Cette Saphir qui courrait les plaines sur son étalon sans carte, sans jamais faiblir… Cette Saphir qui arpentait les marchés… Cette Saphir qui, même si elle n’était pas puissante, était une Saphir forte, arpentant la Nature sans faiblir, visitant les villes, commerçant, s’occupant de son exploitation, connaissant son monde et sa manière de gérer ses affaires… Et moi, maintenant, incapable de traverser un massif montagneux sans faillir, incapable même de traverser une plaine menant à une côté… Qu’adviendrait-il si on me rendait une exploitation ? Qu’adviendrait-il alors ? L’échec… Fatidique, inévitable, inéluctable…
_ Je ne suis plus bonne à rien…
Deux larmes dévalent mes joues… Mes yeux se ferment, mes mâchoires se resserrent, mes doigts se crispent… J’use de mes dernières forces pour me relever… Je titube légèrement, avant de reprendre quelques aplombs… Ma marche reprend… Si je suis incapable de beaucoup, j’espère ne pas l’être pour combler mes remords…


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#4 2010-02-03 13:07:00

Saphir
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Messages: 1143

Re: La Rivière du Temps

Un souffle de vent nouveau… Signe d’une inextinguible attirance… Un flot qui ne tarit jamais, perpétuelle cascade tumultueuse au courant sans cesse renouvelé… Finalement nostalgie toujours plus fraîche… Sempiternelle, Inexpugnable, pourrait-on dire… Marque de quelque empathique dans votre âme, ancrée sur le parchemin de votre existence… Chapitre résigné à l’oubli ? En ces terres l’oubli n’existe pas, il est marque indélébiles…
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